Par Chelsea Aristone, technicienne – KBA
Il est difficile de croire qu’il s’est passé près d’un an depuis que nous avons publié notre dernière mise à jour du dossier des zones clés pour la biodiversité (KBA). Et comme il s’en est passé des choses depuis! L’équipe des KBA à Oiseaux Canada et son partenaire Wildlife Conservation Society Canada ont poursuivi leur travail de détermination des . Cela consiste à évaluer les sites par rapport à des critères établis au palier international afin d’identifier les zones qui sont essentielles à la préservation de la biodiversité et qui peuvent être utilisées pour orienter la planification des mesures de conservation et les priorités en cette matière.
Depuis notre mise à jour de mars 2024, 112 KBA se sont ajoutées à notre liste, qui est accessible sur le site web de KBA Canada, et le processus d’examen de beaucoup d’autres sites se poursuit. Pour en savoir davantage sur les étapes franchies l’an dernier, vous pouvez consulter le rapport annuel 2024 de KBA Canada (en anglais). Tandis que nous poursuivons l’examen des sites candidats, je me permets de vous présenter trois sites récemment désignés KBA.
La KBA de K'ómoks
La KBA de K’ómoks englobe une des plus importantes zones de frai du Hareng du Pacifique en Colombie-Britannique. Chaque année pendant la saison du frai, des troupes de 30 000 à 60 000 oiseaux aquatiques profitent de la nourriture et des nutriments que leur procurent les harengs. Ces importants effectifs comprennent plusieurs espèces d’importance nationale et internationale, dont la Macreuse à front blanc, la Macreuse à ailes blanches et le Goéland à ailes grises. Les parties terrestres de la KBA fournissent aussi un habitat important pour les oiseaux, entre autres le Cygne trompette, qui passe l’hiver dans la vallée de Comox.
Cette KBA, comme beaucoup d’autres dans le sud du Canada, est confrontée à de nombreuses menaces en raison du développement accru dans cette région. Le nombre de personnes vivant dans son territoire a doublé au cours des 25 dernières années et devrait continuer à augmenter. On craint également de plus en plus que la pêche commerciale au hareng qui se pratique actuellement ne soit pas durable, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur les oiseaux marins qui dépendent de la fraye.
La KBA de K’ómoks se trouve sur le territoire traditionnel non cédé de la Première Nation K’ómoks, les gardiens traditionnels de cette terre. Depuis des milliers d’années, les peuples autochtones prennent soin de ce site et, depuis plusieurs décennies, des groupes locaux sont impliqués dans des mesures de conservation. Art Martell, le gardien bénévole de la KBA de K’ómoks, a fait part des récents succès en matière de conservation à ce site, notamment la préservation par la Comox Valley Land Trust de milieux humides essentiels pour la Lamproie de l’Ouest (population de Morrison Creek), la restauration des zones humides côtières de la vallée de Comox et le rétablissement de la population du Damier de Taylor, un papillon rare, sur l’île Hornby.

Des Macreuses à front blanc en vol. Photo: Sean Jenniskens
La KBA du parc national des Prairies et de la région
L’une des plus grandes zones de prairies à herbes mixtes encore intacte au Canada se trouve dans la KBA du parc national des Prairies et de la région, dans le sud de la Saskatchewan. Cette KBA abrite un nombre considérable d’espèces, dont 16 qui satisfont aux critères KBA. L’une de ces espèces est le Tétras des armoises, dont la population a connu un déclin important à l’échelle nationale. Cette espèce est surtout connue pour ses terrains de parade nuptiale, appelés leks, où les mâles effectuent des parades spectaculaires qui consistent à gonfler les sacs aériens jaunes sur leur poitrine et à émettre un son de tambour. Ce site abrite plus de 50% de la population canadienne de Tétras des armoises et renferme une proportion considérable de l’habitat essentiel pour l’espèce au pays. Qui plus est, la KBA accueille les seules colonies de Chiens de prairie à queue noire du Canada. Les terriers que ces mammifères creusent servent d’habitat à plus de 100 autres espèces de vertébrés, dont la Couleuvre agile à ventre jaune de l’Est (une espèce de serpent menacée à l’échelle nationale) et la Chevêche des terriers (un oiseau en voie de disparition à l’échelle nationale).
Le parc national et les pâturages environnants comprennent de vastes étendues de prairies naturelles gérées par Parcs Canada, des peuples autochtones, des éleveurs de bétail et des gestionnaires de pâturages. Pour protéger les habitats et les espèces rares qui s’y trouvent, Julia Put, agente de gestion des ressources au parc national des Prairies, souligne la nécessité d’une collaboration continue de ces entités et intervenants concernant les initiatives de conservation. Les mesures de conservation actuelles comprennent la surveillance des espèces en péril, la restauration des habitats par des moyens comme le pâturage et les brûlages dirigés, les accords de gestion des habitats et la mise en réserve de prairies.

Un Tétras des armoises. Photo: Sean Jenniskens
La KBA de l’île Baccalieu
À cinq kilomètres au large de la pointe nord de la presqu’île Avalon, à Terre-Neuve-et-Labrador, se trouve la plus grande colonie d’Océanites cul-blanc du monde. Cette colonie, située sur l’île Baccalieu, abrite pas moins de 1,95 million de couples reproducteurs (soit plus de 13% de la population mondiale et plus de 37% de la population canadienne de l’Atlantique), selon une étude réalisée en 2013 par le Service canadien de la faune. Les Océanites cul-blanc nichent dans des terriers et ne sont actifs sur terre que la nuit pour éviter la prédation exercée par des laridés et des labbes. Kyle d’Entremont, coordonnateur de la recherche à l’Université Memorial de Terre-Neuve, décrit le son impressionnant de la colonie de l’île Baccalieu la nuit: «C’était vraiment un plaisir de pouvoir s’asseoir dehors dans la colonie à 3 heures du matin et d’écouter des centaines de milliers d’entre eux retourner dans leurs terriers; les collines semblaient trembler tellement le bruit pouvait être fort certaines nuits.» En 1995, ce site a été reconnu comme réserve écologique provinciale, ce qui en fait la plus grande colonie d’oiseaux de mer protégée de Terre-Neuve-et-Labrador. Si cela ne suffit pas à impressionner, l’île Baccalieu abrite également la deuxième plus grande colonie de Macareux moines d’Amérique du Nord, avec 75 000 couples reproducteurs recensés lors du plus récent relevé.
De nombreuses mesures de conservation sont en place pour éviter de perturber la nidification des oiseaux marins dans cette KBA, notamment un accès limité à l’île et une interdiction des vols à basse altitude. Cependant, malgré son statut de zone protégée et les efforts de conservation en cours, la pollution par les hydrocarbures, l’éclairage artificiel nocturne, le réchauffement des océans et les pratiques de pêche incompatibles continuent de mettre en péril les oiseaux marins qui nichent sur l’île Baccalieu. Kyle d’Entremont met en lumière certains efforts de conservation récents déployés dans l’île, où des membres du laboratoire Montevecchi de l’Université Memorial ont collaboré avec l’usine de transformation du poisson Quinlan Brothers à Baie-de-Verde, une localité voisine, et ont constaté que la réduction de l’éclairage artificiel nocturne entraînait une diminution significative du nombre d’océanites échoués à l’usine. Ces travaux attirent l’attention sur l’importance de poursuivre la sensibilisation et le dialogue avec les collectivités proches de l’île Baccalieu afin d’encourager la réduction de cet éclairage lorsque cela est possible.

Un Océanite cul-blanc en vol. Photo: Blair Dudeck
Pour obtenir la liste à jour des KBA désignées, consultez la carte des sites sur notre site web. Alors que nous poursuivons le travail d’identification des KBA, nous nous concentrons également sur l’intendance des sites et le suivi de leur situation. Pour en savoir plus sur nos plans pour cette prochaine étape du programme, vous pouvez visionner le webinaire destiné aux gardiens de KBA.
Pour obtenir de plus amples renseignements sur les KBA, rendez-vous au site web de KBA Canada ou communiquez avec Amanda Bichel (abichel @ birdscanada.org).