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Par Jody Allair, directeur des Communications, Oiseaux Canada

Vivre dans les prairies du sud de l’Alberta m’a permis de découvrir certains des plus impressionnants spectacles de l’histoire naturelle du Canada. Depuis les hardes d’antilopes traversant sans effort les plaines jusqu’aux volées de Pélicans d’Amérique, en passant par les bruyants vols de parade des Courlis à long bec en train de nidifier, cette merveilleuse région du Canada est une destination de rêve tant pour les observateurs d’oiseaux que pour les naturalistes. Mais si je devais choisir mon expérience ornithologique préférée chaque printemps, ce serait l’observation de la captivante parade nuptiale du Plectrophane à ventre noir.

Plectrophane à ventre noir. Photo: May Haga

Depuis mon arrivée dans la région en 2018, je m’efforce chaque printemps de visiter l’habitat des prairies à herbes courtes qui accueille plusieurs de nos passereaux spécialistes de ce milieu naturel, notamment le Pipit de Sprague, les Bruants de Baird et de Brewer, les Plectrophanes à ventre gris et à ventre noir ainsi que le Bruant noir et blanc. Il y a quelques années, j’ai visité un château fort des oiseaux de ce milieu à l’est de Brooks, en Alberta, connu sous le nom de lac Tide. Pour beaucoup de gens de passage, ce paysage plat et clairsemé peut ressembler à un terrain vague désert. Toutefois, quiconque prend le temps de sortir et de découvrir la région de près découvre une gamme d’oiseaux tourbillonnants qui donnent le tournis et un répertoire de chants qui rivalisent avec l’avifaune de n’importe quelle forêt de l’Est.

Photo: Jody Allair

Mon objectif en ce début de matinée de juin était d’être dans la prairie à l’aube, soit vers 5h20 en cette période de l’année. J’ai campé à proximité afin d’atteindre ma destination peu après le lever du soleil. Quelques minutes suivant mon arrivée, j’étais entouré d’oiseaux des prairies qui chantaient et se pavanaient, dont une Barge marbrée très bruyante et plusieurs Plectrophanes à ventre noir. Le paysage est indéniablement plat, avec de l’herbe courte clairsemée et une couche de mousse et de lichens (qu’on appelle là-bas la «croûte des prairies»), paysage dans lequel quelques bovins et antilopes broutent au loin, sur un fond d’armoises éparses qui donnent à l’air un parfum légèrement sucré.

Contrairement aux paysages forestiers, où les passereaux ont tendance à chanter depuis la cime des arbres, de nombreux oiseaux chanteurs des prairies prennent leur envol pour proclamer leur territoire et attirer des partenaires. Les Plectrophanes à ventre noir chantent en effet du haut d’une armoise ou d’un poteau de clôture, mais lorsque les choses deviennent sérieuses, ils s’envolent jusqu’à 20 m de hauteur, puis descendent progressivement vers le sol, les ailes déployées et la tête levée, en chantant. Vu d’en bas, le ventre noir de l’espèce contraste fortement avec la queue blanche évasée, dont les rectrices internes arborent un triangle noir caractéristique. Une fois revenus au sol, ces oiseaux se perchent, le haut du corps dressé, comme s’ils étaient fiers de ce spectacle absolument époustouflant. Après quelques minutes, les mâles remontent dans le ciel pour effectuer de nouveaux vols de parade, déterminés à surpasser leurs rivaux des environs.

Plectrophane à ventre noir. Photo: Aaron Roberge

J’aimerais que tout le monde puisse assister à ces prestations au moins une fois. Le spectacle des Plectrophanes à ventre noir qui paradent dans le ciel tout autour de vous alors que le soleil se lève sur les prairies est à mon avis sans égal. La triste réalité est que le phénomène est de plus en plus difficile à observer chaque année au Canada, principalement en raison de la perte d’habitat causée par la conversion des prairies en terres agricoles et le développement urbain. Chaque année, nous perdons des milliers d’hectares de prairies dans cette région. Ce paysage disparaît rapidement, tout comme les oiseaux qui en dépendent.

Une population chancelante

Pour nous, il a été facile de choisir le Plectrophane à ventre noir comme ambassadeur aviaire d’Oiseaux Canada pour 2025. Comme l’indique le rapport de 2024 sur l’état des populations d’oiseaux du Canada, les effectifs des oiseaux des prairies ont diminué de 67% depuis 1970. Et le nombre de Plectrophanes à ventre noir a chuté de plus de 95%, ce qui est alarmant. Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a classé cet oiseau dans la catégorie des espèces en voie de disparition en raison du déclin rapide et accéléré de sa population. Je pense qu’il est important que tout le monde en sache un peu plus sur le Plectrophane à ventre noir, dont l’aire de répartition limitée couvre le sud-ouest du Manitoba et le sud de l’Alberta. Non seulement vous découvrirez à quel point ces oiseaux sont merveilleux, mais vous prendrez conscience de ce que nous risquons de perdre si nous ne stoppons pas la perte d’habitat qui se produit actuellement dans les prairies canadiennes.

Photo: Jody Allair
Voici quelques faits et des liens vers des ressources qui vous permettront de mieux connaître le Plectrophane à ventre noir:
  • Il s’agit de l’une des quatre espèces de plectrophanes de l’Amérique du Nord. Les Plectrophanes de Smith et lapon nichent dans l’Arctique, tandis que les Plectrophanes à ventre gris et à ventre noir sont inféodés à la région des prairies naturelles.
  • Le Plectrophane à ventre noir est un passereau ressemblant à un bruant (15 cm de longueur) qui a une envergure de 26 cm et qui pèse environ 21 grammes (l’équivalent du poids de trois pièces d’un dollar). Pendant la période de reproduction, les mâles sont très frappants avec leur calotte, leur ligne derrière l’oeil et leur poitrine noires, leur gorge jaunâtre-chamois et la tache marron foncé apparaissant sur leur nuque. Le plumage des femelles est semblable, mais plus discret.
  • Le nom plectrophane vient du grec ancien «plektron», qui signifie «instrument pour frapper» et «phanos», qui signifie «qui brille» ou «luisant». Les plectrophanes ont souvent des plumages aux motifs frappants, ce qui pourrait expliquer l’origine de leur nom.
  • Le chant est un doux gazouillis qui commence sur une note haute et claire et se termine sur une note plus basse et plus bourdonnante. Il rappelle quelque peu celui de la Sturnelle de l’Ouest. Écoutez-le ci-dessous:

 

  • Pendant la période de reproduction, de mai à août, les Plectrophanes à ventre noir fréquentent les régions à herbes courtes et à herbes mixtes du nord des Grandes Plaines. Dès lors, ils bénéficient du pâturage du bétail dans les prairies naturelles. Le reste de l’année, ils se trouvent dans le sud des Grandes Plaines et plus au sud, jusque dans le désert de Chihuahua, au Mexique. La carte détaillée accessible sur notre plateforme NatureCounts montre où ces oiseaux sont présents au Canada.
  • Entre autres avec un outil comme l’Indice de préservation de l’avifaune, Oiseaux Canada travaille de concert avec les propriétaires de terres et les éleveurs de bétail des Prairies canadiennes pour préserver des espèces comme le Plectrophane à ventre noir.
  • Pour en savoir plus sur l’état, les tendances et la répartition de la population du Plectrophane à ventre noir au Canada, consultez la page web de L’état des populations d’oiseaux du Canada portant sur l’espèce.

Tout au long de l’année, nous célébrerons cette espèce spéciale en publiant des récits. Restez à l’affût!. Si vous avez passé de beaux moments en observant cet oiseau, merveilleux symbole des prairies, n’hésitez pas à nous en faire part à communications@birdscanada.org.

 

Vous pouvez venir en aide à des espèces comme le Plectrophane à ventre noir.

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